Le projet des sociétés communautaires est porté par le Président de la République, lui-même. C’est un modèle de sociétés d’économie sociale et solidaire qui peut trouver sa place dans le paysage économique de la Tunisie. C’est aussi un projet qui piétine encore malgré un dispositif législatif important et un soutien institutionnel et financier sans relâche. C’est le décret-loi N°15-2022 du 20 Mars 2022 qui a mis en place le cadre législatif des sociétés communautaires. Mais, jusqu’à aujourd’hui ce modèle n’arrive pas à décoller et on n’a pas vu aucune success story qui peut convaincre certains experts qui critiquent la viabilité et la rentabilité de ce type de sociétés.
Un décret-loi et des textes d’application:
Afin de donner un coup d’accélérateur à ce modèle, le Président de la République a promulgué le décret-loi n°2025-3, en date du 2 octobre 2025 qui a modifié le cadre des sociétés communautaires en simplifiant leur création et leur gestion surtout en réduisant le nombre d’actionnaires nécessaires. Le nouveau texte donne aussi de nouveaux avantages fiscaux et fonciers, et instaure un registre national pour plus de transparence. Les sociétés communautaires bénéficient aussi d’exonérations fiscales sur 10 ans et un accès facilité aux terrains publics.
On ne peut pas mieux faire en termes d’incitation à l’investissement et création d’entreprises.
En Tunisie nous étions toujours habitués à ce que la loi soit promulguée mais n’entre pas en vigueur à cause du retard dans la publication des textes d’application. Les cas en Tunisie ne manquent pas pour ce cas de figure. Nous avons même des lois qui ont été promulguées et amendées sans même être appliquées. Contrairement à la coutume législative, les textes d’application pour ce décret-loi n’ont pas tardé à venir.
Le dernier journal officiel a vu la publication de l’arrêté du ministre de l’agriculture, de la pêche et des ressources hydriques en date du 7 Novembre 2025 et qui fixe les conditions d’octroi des concessions du domaine public des forêts aux sociétés communautaires de gré à gré.
Un autre arrêté du même ministère en date du 4 Novembre 2025, a fixé les conditions d’octroi de la priorité aux sociétés communautaires pour la location des terres domaniales agricoles de gré à gré.
La ministre des finances a aussi signé un arrêté en date du 4 Novembre 2025 qui fixe les conditions de la garantie faite par le Fonds National de Garantie aux crédits octroyés aux sociétés communautaires. Selon cet arrêté, et afin de bénéficier de la garantie du FNG, les banques sont obligées de déclarer les crédits octroyées aux sociétés communautaires. L’article 4 de l’arrêté va même un peu loin. Le crédit octroyé aux sociétés communautaires est couvert à 90% par le FNG et les 10% restantes sont couvertes par la banque elle-même.
Dans le même journal officiel est publié aussi la circulaire de la Banque Centrale N°14, qui fixe le taux d’intérêt préférentiel applicable pour les crédits octroyés aux sociétés communautaires sur les fonds propres des banques. En effet, ces crédits leur sera appliqué un taux équivalent à TMM+1% seulement. Cette circulaire vient en application à l’article 70 du décret-loi du 02 Octobre 2025.
Le ministre de l’intérieur a de son côté publié un arrêté en date du 4 Novembre 2025 et quia fixé les conditions et les procédures pour la location du domaine public des municipalités pour les sociétés communautaires, de gré à gré.
Ce dispositif législatif sans précédent dans l’histoire économique de la Tunisie est soutenu aussi par un dispositif financier important. Le projet de loi des finances pour 2026 prévoit une ligne budgétaire de 35 millions de dinars sur le fonds national pour l’emploi pour le financement des sociétés communautaires.
Sans oublier les financements déjà prévus par la Banque Tunisienne de Solidarité.
Cueillir les fruits :
Jusqu’à aujourd’hui, le nombre de sociétés communautaires entrées en activité ne dépasse pas les 60 sur les 250 réellement créées. Ils sont principalement dans le domaine agricole.
Le ministre de l’emploi a annoncé que l’objectif est de créer 400 nouvelles sociétés communautaires en 2026. Un objectif atteignable à la lumière des incitations qui ont été prévues pour ce type de sociétés.
Selon leur modèle économique, ces sociétés auront un impact sur le développement régional et l’emploi. Ils constitueront une troisième voie entre le secteur privé et le secteur public.
Certains experts doutent jusqu’à présent de la viabilité et la rentabilité de ce type de sociétés. Ce nouveau dispositif législatif, institutionnel et financier va-t-il changer la donne ? Wait and see.





















