Interview avec M. Aslan Berjeb
Président de la Confédération des Entreprises Citoyennes de Tunisie (CONECT)
Dans un contexte économique marqué par de profondes mutations et une quête urgente de réformes structurelles, la Confédération des Entreprises Citoyennes de Tunisie (CONECT) s’affirme comme un acteur incontournable du paysage patronal national. À sa tête, M. Aslan Berjeb, récemment élu président, incarne une nouvelle vision de l’entreprise tunisienne : compétitive, responsable et ouverte sur le monde.
À travers un plan stratégique ambitieux couvrant la période 2024-2027, la CONECT entend placer l’entreprise au cœur de la relance économique, en misant sur trois leviers essentiels : la croissance et la création de richesse, la double transition écologique et numérique, ainsi que l’entrepreneuriat porté par la jeunesse et le talent.
Dans cet entretien exclusif, M. Aslan Berjeb revient sur sa vision, les priorités de son mandat et les réformes qu’il juge indispensables pour restaurer la confiance, stimuler l’investissement et redonner à la Tunisie son rôle de hub économique et entrepreneurial en Méditerranée et en Afrique.
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Vision et priorités
Monsieur le Président, quels sont aujourd’hui vos grands axes stratégiques pour la CONECT et quelle vision souhaitez-vous imprimer à votre mandat ?
Dès notre élection, nous avons tracé une feuille de route claire à travers le plan d’action 2024-2027, articulé autour de trois grands axes : Croissance, Emploi et Richesse ; Transition jumelle écologique et numérique ; Entrepreneuriat, Jeunesse et Talent.
Ma vision pour la CONECT repose sur trois piliers qui guident toutes nos actions : l’entreprise citoyenne, l’ouverture internationale et l’innovation.
L’entreprise n’est pas seulement un acteur économique ; elle est un acteur citoyen, au cœur de la croissance, de l’innovation et de l’équilibre social de notre pays.
Nous voulons des entreprises tunisiennes à la fois compétitives, responsables et ouvertes sur le monde.
Concrètement, cela signifie :
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Accélérer l’accès aux marchés, en Tunisie comme à l’international, à travers CONECT International et nos missions économiques.
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Alléger la complexité économique et administrative, en plaidant pour des réformes structurelles qui favorisent la transparence, la compétitivité et la liberté d’entreprendre.
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Préparer l’avenir en accompagnant nos entreprises dans la transition énergétique et numérique, en renforçant leur capacité d’innovation et en intégrant l’économie circulaire et l’économie d’impact.
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Investir dans la jeunesse et le talent, car ce sont eux qui porteront demain la relance et le rayonnement de notre économie.
Nous voulons des entreprises tunisiennes à la fois compétitives, responsables et ouvertes sur le monde. C’est le sens de l’entreprise citoyenne que nous défendons : une entreprise créatrice de valeur économique, mais aussi sociale et environnementale, au service de la Tunisie.
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Climat des affaires
Comment évaluez-vous le climat des affaires actuel en Tunisie et quelles réformes urgentes estimez-vous nécessaires pour renforcer la confiance des investisseurs et des entrepreneurs ?
Le climat des affaires en Tunisie connaît aujourd’hui des défis, liés notamment à la complexité réglementaire et à l’instabilité du contexte mondial. Malgré cela, notre pays conserve des atouts considérables qui doivent être valorisés.
La confiance, qu’elle soit celle de l’entrepreneur tunisien ou de l’investisseur étranger, est essentielle. Elle se construit dans la durée, à travers un environnement économique lisible et prévisible.
C’est pourquoi nous plaidons pour :
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Une réforme fiscale et douanière claire, équitable et prévisible, afin de donner de la visibilité aux acteurs économiques.
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Un accès facilité au financement, en particulier pour les PME, via des mécanismes innovants adaptés à leurs réalités.
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Une justice économique plus rapide et plus efficace, garantissant la sécurité des transactions et renforçant la confiance dans l’État de droit.
La Tunisie peut et doit redevenir une terre d’opportunités et de stabilité, capable d’attirer des investissements de qualité dans des secteurs stratégiques tels que la transition énergétique, la santé, les technologies de pointe, l’agriculture durable et les industries à forte valeur ajoutée.
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PME et entrepreneuriat
La CONECT se présente comme un acteur proche des petites et moyennes entreprises. Quels sont les principaux défis rencontrés par les PME tunisiennes et comment votre organisation entend-elle les soutenir concrètement ?
Les PME sont le cœur battant de notre économie : leur donner accès au financement et aux marchés, c’est investir directement dans l’avenir de la Tunisie. Elles représentent la majorité du tissu entrepreneurial et créent l’essentiel de la valeur et de l’emploi. Pourtant, elles font face à un triple défi : un accès limité au financement, une ouverture insuffisante aux marchés et des lourdeurs administratives qui freinent leur développement.
Face à cela, la CONECT agit de manière très concrète :
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Accompagnement au financement, à travers des partenariats avec les institutions financières, les fonds d’investissement et les lignes de crédit étrangères pour mieux répondre aux besoins des entreprises.
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Accès aux marchés internationaux, grâce à CONECT International qui facilite l’exportation, l’implantation à l’étranger et la mise en relation avec la diaspora tunisienne, levier précieux de développement.
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Formation et renforcement de capacités, via des programmes qui préparent nos PME aux nouveaux impératifs : transformation digitale, économie circulaire, certifications internationales.
Nous encourageons également le développement de l’économie d’impact, qui attire de plus en plus les jeunes entrepreneurs : ils veulent créer des entreprises performantes mais aussi engagées, porteuses d’utilité sociale et environnementale.
En somme, notre rôle est de mettre à la disposition des PME les outils nécessaires pour qu’elles deviennent plus compétitives, plus innovantes et mieux intégrées aux chaînes de valeur régionales et internationales.
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Économie citoyenne et responsabilité sociale
Le concept d’« entreprise citoyenne » est au cœur de la mission de la CONECT. Comment traduisez-vous cette notion dans la pratique et quels exemples réussis pouvez-vous partager ?
L’« entreprise citoyenne » n’est pas une formule, c’est une démarche. Elle correspond parfaitement à la vocation sociale de l’État, mais elle va au-delà : elle représente aussi une condition de compétitivité dans l’économie moderne.
Aujourd’hui, la compétitivité d’une entreprise ne se mesure plus seulement au prix ou à la qualité, mais aussi à son empreinte carbone, à son impact social et à sa transparence. Ce sont ces paramètres qui orientent désormais les choix des investisseurs, des consommateurs et des marchés internationaux.
Concrètement, l’entreprise citoyenne c’est :
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Respecter ses engagements vis-à-vis de l’État, de ses collaborateurs et de son environnement.
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Réduire son empreinte écologique en intégrant l’économie circulaire et en anticipant les exigences mondiales en matière de durabilité.
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Contribuer au progrès social, en investissant dans les communautés locales et en créant un climat inclusif et équitable.
À la CONECT, nous voyons déjà des exemples inspirants :
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Des PME qui ont intégré les énergies renouvelables dans leur chaîne de production.
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D’autres qui ont mis en place des filières circulaires, transformant les déchets en ressources créatrices de valeur.
C’est dans cette articulation entre engagement social et compétitivité économique que réside l’avenir de l’entreprise tunisienne. En ce sens, l’« entreprise citoyenne » n’est pas seulement une réponse aux attentes sociales, elle est aussi un levier stratégique pour le rayonnement international de la Tunisie et pour renforcer la place de nos entreprises sur les marchés mondiaux.
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Ouverture internationale
Dans un contexte de concurrence mondiale accrue, quelles opportunités d’internationalisation s’offrent aujourd’hui aux entreprises tunisiennes et quel rôle peut jouer la CONECT pour les accompagner à l’export ?
La Tunisie n’est pas un grand marché intérieur comme peuvent l’être l’Éthiopie, le Nigeria ou l’Égypte. C’est un marché de taille respectable, historiquement tournée vers l’international. Pour nous, à la CONECT, l’ouverture internationale n’est pas seulement une vocation naturelle pour la Tunisie ; elle est aussi une nécessité stratégique et surtout un véritable levier de croissance pour nos entreprises. C’est dans cette ouverture que réside notre force et notre vocation.
La CONECT l’a compris dès sa création, en donnant une place centrale à CONECT International dans son organisation. Car l’avenir de nos entreprises ne peut se limiter au marché local : il repose sur leur capacité à s’intégrer aux chaînes de valeur régionales et mondiales.
Pour cela, notre action s’articule autour de deux orientations complémentaires :
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Capitaliser sur les partenariats stratégiques et historiques de la Tunisie, notamment avec l’Europe et la Méditerranée, qui restent nos partenaires naturels.
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Diversifier nos horizons, en développant de nouveaux partenariats avec l’Europe du Nord et l’Afrique subsaharienne. Ces derniers mois, nous avons ainsi conduit des missions vers la Suède, le Danemark, la Finlande et l’Autriche, des destinations stratégiques dans des secteurs de pointe comme la transition énergétique, le traitement des déchets, le traitement des eaux et l’innovation technologique.
En parallèle, nous continuons de renforcer notre présence sur les marchés africains, qui demeurent des terrains d’opportunités majeurs, en particulier à travers la ZLECAf et le COMESA. Dans cet esprit, la CONECT s’inspire de la dynamique portée par l’IATF, qui donne vie concrètement à l’intégration africaine et au décloisonnement des marchés.
Notre conviction est claire : la Tunisie peut devenir un modèle d’internationalisation intelligente, en combinant ses partenariats historiques avec une diversification audacieuse et en projetant ses entreprises comme des acteurs compétitifs, innovants et citoyens sur la scène internationale.
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Dialogue public-privé
