Le problème de l’eau en Tunisie est un enjeu stratégique, même avant le sacrifice du mouton et les prix des viandes rouges.
La Tunisie est en situation de stress hydrique depuis des années, et la situation ne s’améliore pas, malgré le peu d’effort qu’on arrive à déployer.
Selon l’organisation mondiale de la santé (OMS), on parle de stress hydrique lorsque les disponibilités en eau par habitant/an sont inférieures à 1700 m3. Lorsque ces disponibilités sont inférieures à 1000 m3 /hab/an, on parle à de pénurie d’eau. En dessous de 500m3 /hab/an, on est dans une situation de pauvreté hydrique.
Selon le World Resources Institute, la Tunisie est classée à la 30ème position sur 164 pays avec une moyenne de 410 m³ d’eau par habitant et par an, la répertoriant ainsi dans la catégorie de pays exposés à un stress hydrique élevé.
Malgré les récentes précipitations enregistrées durant les derniers mois, les barrages en Tunisie ne sont remplis qu’à peine 40%, et il nous attend un été sec et chaud.
Selon une récente publication du World Resources Institute sur la carte du stress hydrique en 2050, la Tunisie, ainsi que tous les pays arabes du moyen orient et le Maghreb, se trouve dans la zone du stress hydrique très élevé. En effet, en 2050, l’eau disponible et mobilisable en Tunisie ne couvrira que 20% de nos besoins.
Selon l’étude de l’ITES intitulée « eau 2050 », les besoins du consommateur tunisien en eau passeront de 1500 m3/an/habitant en 2010 à 1700 m3/an/habitant.
Sans entrer dans les détails des causes de cette situation relatifs aux changements climatiques, il est important de savoir si nous avons mis les stratégies nécessaires pour la disponibilité de l’eau pour les générations futures.
En 2050, il sera difficile d’avoir une eau potable disponible continuellement et en quantité et qualité suffisante pour le citoyen tunisien. Le prix d’une bouteille d’eau potable sera multiplié par 5 dans 20 ans, et nous n’aurions de l’eau dans les robinets que 3 heures par jour. On aura des guérillas urbaines pour un bidon d’eau potable. C’est un scénario catastrophe, mais qui est fort probable si des mesures urgentes et des solutions stratégiques ne sont pas mis en œuvre.
C’est ainsi qu’il est important de repenser la carte de la production agricole, et ne pas se concentrer sur les productions qui nécessitent beaucoup d’eau. Dans le même contexte il est important d’encourager l’utilisation des eaux traitées dans l’agriculture, puisque nous n’utilisons actuellement que 4% des eaux traitées dans l’irrigation.
La sensibilisation est un axe très important sur lequel la Tunisie doit travailler, même si son impact n’est pas toujours palpable et mesurable.
On doit aussi penser à un système d’encouragement et d’incitation pour la mise en œuvre de systèmes d’efficacité de l’utilisation des eaux. L’innovation dans ce contexte doit jouer un rôle important que ce soit au niveau de la prospection des ressources en eau ou de la rationalisation de l’utilisation de l’eau dans les principaux secteurs.
Nous tenons à vous informer, ainsi que tous les responsables de la politique hydrique en Tunisie, que 2050 c’est demain.
Abou FARAH