Malgré le développement des fintechs, des moyens de paiements électroniques, des cartes bancaires et terminaux de paiements, le cash fait de la résistance et continue de s’imposer sur la scène économique nationale et internationale. En effet, plus de 8 transactions sur 10 dans le monde se font avec du cash. Selon une étude menée par la Banque mondiale en 2024, 1,4 milliard de personnes dans le monde n’ont toujours pas accès à un compte bancaire et n’utilisent que de l’argent liquide.
Des disparités mondiales :
Le positionnement de l’argent liquide dans un pays dépend de plusieurs facteurs. En effet, un secteur bancaire pas très développé et qui ne commercialise pas des moyens de paiement électronique ou à distance pousse les clients à utiliser massivement le cash.
La dominance de l’argent liquide peut aussi dépendre de la culture des acteurs économiques d’un pays. Le liquide est toujours synonyme de sécurité et de confiance. C’est aussi une préférence de certains commerçants pour des raisons de trésorerie et de peur de la traçabilité des transactions. Pour certains consommateurs, l’argent liquide permet de protéger la vie privée, d’éviter les problèmes liés aux paiements électroniques et de réduire les risques liés à l’usurpation d’identité.
La faible inclusion financière dans un pays est aussi un terrain favorable pour la dominance du cash. Cette situation s’amplifie surtout en l’absence de politiques gouvernementales pour freiner ou réduire le recours à l’argent liquide.
Le site « Visual Capitalist » vient de publier un classement des pays selon le pourcentage d’utilisation du cash dans chaque économie. Le classement se base sur une estimation des paiements qui se font par les consommateurs pour les restaurants, les achats alimentaires, vente au détail, hôtels,…
Selon ce classement ce sont principalement les pays pauvres qui dépendent le plus des transactions en espèces. En tête de ce classement on trouve le Myanmar avec 98% des transactions qui se font en espèce, suivi de l’Ethiopie (95%), la Gambie (95 %), l’Albanie (90%), le Cambodge (90%), le Laos (90%) et le Liban (90%).
Les pays les plus riches et surtout les pays scandinaves arrivent en tête de ce classement. A ce titre on retrouve la Corée du Sud (10 %), la Norvège (10 %), la Chine (10%) et la Suède (14 %).
L’Europe présente un profil hétérogène à cause de la diversité des pays. Selon une récente étude de la Banque centrale européenne, le paiement en espèces reste le moyen le plus utilisé en magasin. Mais son déclin se poursuit lentement dans la majeure partie des pays européens. Les paiements en espèces représentaient encore 52 % des transactions en point de vente, contre 39 % pour le paiement par carte et 6 % pour le paiement mobile, qui continuent de progresser.
Le site relève certaines valeurs aberrantes pour l’utilisation du cash tel que le taux au Japon dont le cash est utilisé à 60 % pour des raisons culturelles, l’Allemagne, avec 51 %, et l’Italie, avec 62 % à cause d’un niveau d’économie informelle important.
L’argent liquide n’est une fatalité :
La Tunisie figure à la 60ème place de ce classement avec 55% des transactions qui se font avec de l’argent liquide. Pour mémoire les Billets et Monnaie en Circulation en Tunisie ont atteint des recors en 2025 avec un pic à plus de 26 milliards de dinars au mois d’Août. Au 1er Décembre 2025, les BMC sont au même niveau avec 25.9 milliards de dinars. Cette situation pèse énormément sur le besoin de refinancement des banques qui a atteint au 1er Décembre 2025, 11 milliards de dinars.
La situation en Tunisie traduit plusieurs phénomènes tels que la faible inclusion financière qui ne dépasse pas les 36%, la résistance culturelle des consommateurs tunisiens qui ont une grande préférence pour le cash, l’absence de politique gouvernementale active et claire pour la réduction du recours à l’argent liquide et le développement continue du secteur informel. La Tunisie se place devant des pays européens comme l’Espagne (57%), la Slovénie (57%), la Slovakie (57%), l’Italie (62%), et le Maroc (65%).
Pour ne pas tomber dans la fatalité, le recours excessif à l’argent liquide n’est pas vraiment un grand handicap pour l’économie s’il est bien encadré. En effet, certains pays tel que la Suède encouragent actuellement les consommateurs à avoir recours au cash. Ils ont découverts que trop de paiements électroniques ont fait exclure une partie de la population telle que les personnes âgées, les habitants des zones rurales, et les personnes défavorisées.
C’est ainsi que la disparition du cash n’est pas une bonne chose. Elle n’est pas non plus pour demain. L’usage du cash est en régression certes, mais dans plusieurs cas il y a une grande résistance. Un système hybride persistera encore.