Depuis quelques années les prix des viandes rouges s’envolent, les rendant un produit de luxe, inaccessible pour la majorité des tunisiens. La consommation des tunisiens a nettement baissé passant de 10 kilo/personne/an en 2015, à 7 kilo/personne/an en 2023. Une baisse qui traduit la hausse des prix. Les raisons de cette hausse sont multiples, et les initiatives ne manquent pas pour la calmer. Pourtant les tunisiens voient encore rouge. Des réformes profondes sont nécessaires.
Hausse de 18.8% des viandes ovines :
Les viandes rouges sont les produits qui ont enregistré la plus grande hausse depuis des années. En 2015 la moyenne d’un kilo de viande ovine était de 20.200 d, alors qu’aujourd’hui la moyenne et de 53 dinars. Pour la viande bovine, la moyenne en 2015 était de 16.500 d, alors qu’aujourd’hui elle dépasse les 44 dinars. La hausse varie ainsi entre 150 et 250% durant les 10 dernières années.
Selon les chiffres de l’INS, les prix de la viande ovine ont augmenté de 18.8% sur un an et ceux de la viande bovine de 9.8%.
Cette hausse à limité l’accès des tunisiens à ce produit mais elle a causé aussi la fermeture de plusieurs bouchers. Selon la chambre syndicale des bouchers relevant de l’UTICA plus de 1000 bouchers ont mis les clés sous la porte durant les 5 dernières années.
Le problème du secteur de la viande rouge est principalement un problème d’offre et un problème de coûts. La Tunisie produit annuellement plus de 110.000 tonnes de viande rouge alors que les besoins atteignent parfois 124.000 tonnes. Le problème aussi est que cette offre n’est pas toujours au rendez-vous et dépend selon les saisons et les pics de consommation telle que Ramadan ou l’Aid El Kebir. Le gap entre la production et la consommation est généralement compensé par l’importation de la viande congelée pour les hôtels et restaurants et par les importations de génisses pour l’élevage et l’abattage.
Les raisons d’une hausse qui dure:
Les raisons de la hausse des prix des viandes rouges en Tunisie sont multiples, mais sont devenues structurelles :
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La chute du cheptel que ce soit en bovin ou ovin à cause de la hausse des prix de l’alimentation animale et qui a poussé plusieurs éleveurs à vendre leur bétail et de sortir du secteur de l’élevage, de l’abattage anarchique des femelles, et de la contrebande. Selon les chiffres du ministère de l’agriculture le cheptel bovin est passé de 650 000 têtes en 2013 à 380 000 en 2024, et le cheptel ovin de 7 millions à environ 4 millions sur la même période.
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La période de sècheresse qui frappé la Tunisie pendant 4 ans et qui a nettement réduit le pâturage et par conséquent fait augmenté les coûts de l’élevage.
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Des éleveurs de petite taille, non organisés et ne disposant pas suffisamment de moyens.
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L’anarchie qui persiste dans les marchés aux bestiaux. En effet, la spéculation des intermédiaires dans ces marchés fait monter les prix du bétail et par conséquent les prix à la vente de la viande.
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L’absence de régulation suffisante du marché de la viande à travers le recours à l’importation que ce soit en carcasses ou en bétail à l’élevage.
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L’absence ou le report de réformes structurelles qui touchent tous les maillons de la chaine, de l’éleveur au consommateur.
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La hausse des prix des viandes rouges est aussi le résultat d’une inflation généralisée qui a touché tous les produits et différents intrants dans l’élevage, l’abattage et la transformation.
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Des circuits de distribution non organisés et peu transparents,
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L’absence de bouchers qualifiés qui maitrisent la technique de la découpe, la transformation et le stockage de la viande rouge. En effet, le métier de boucher est appris dans la majeure partie sur le tas ou hérité de père en fils.





















