Tous les ménages tunisiens vivent ces jours-ci sous la pression de la rentrée scolaire et universitaire. Une pression qui découle certes d’un changement de rythme de vie après 3 mois de repos, mais aussi du coût exorbitant de cette rentrée. Les frais de scolarité ne cessent d’augmenter alors que les revenus des ménages stagnent et même s’effritent sous l’effet d’une inflation galopante.
Dans l’esprit des ménages tunisiens l’éducation des enfants est une priorité absolue partant d’un principe que c’est le seul ascenseur social viable qui permet d’avoir des conditions de vie acceptables et dignes et garantir un avenir radieux. C’est pour cette raison qu’ils sont prêts à tous les sacrifices pour offrir à leurs enfants des conditions de rentrée confortable.
Selon l’enquête consommation de l’INS réalisée en 2021, les ménages tunisiens consacrent en moyenne 1.5% de leur budget à l’éducation, contre 2.2% selon l’enquête de 2015. En termes monétaires les ménages consacrent 81 dinars par personne et par an à l’éducation et l’enseignement. Un chiffre, à notre sens, qui ne correspond pas à la réalité et ne prend pas en considération les hausses des prix, ni le quotidien des ménages.
Pour le ministère de l’éducation nationale cette rentrée a aussi un coût. En effet, le budget du ministère a atteint en 2025 plus de 8055 MD dont 95% sont des salaires. Le coût d’un élève du primaire pour le ministère de l’éducation est de 2015 D/an, alors qu’il est de 3524 D/an pour les élèves du collège et du lycée. Pour le ministère de l’enseignement supérieur, un étudiant coûte en moyenne 8200 D/an (2023-2024) contre 6168 D/an en 2018.
Le panier des frais de scolarité pour les ménages tunisiens comprend plusieurs articles. On trouve :
– les frais d’inscription qui ne dépassent pas les 8 dinars pour l’enseignement public, mais atteignent les 250 dinars dans le secteur privé,
-Les frais liés à la fourniture scolaire,
-Les frais d’inscription dans une garderie scolaire pour certains ménages, surtout du grand Tunis,
-Les mensualités de la scolarité pour le secteur privé et qui varient entre 400 et 900 dinars/mois, selon les établissements et les niveaux.
-Les abonnements dans le transport public,
-L’achat des vêtements pour la rentrée, et surtout les vêtements de sport pour l’éducation physique,
-A la lumière des prix pratiqués aujourd’hui, et en prenant en considération les frais de scolarité, d’inscription, de fournitures scolaires ou du transport, le montant qui va être dépensé par les ménages tunisiens est colossale. Nous avons essayé d’estimer le montant qui va être dépensé par les ménages en se basant aussi sur le nombre des élèves et des étudiants inscrits dans les années préparatoires, les écoles, les collèges, les lycées et les universités, dans les deux secteurs privés et public. Nos principales sources de données sont nécessairement le ministère de l’éducation nationale et le ministère de l’enseignement supérieur. La Tunisie compte aujourd’hui plus de 265000 élèves dans le secteur privé (préparatoire, écoles, collèges, et lycées), contre 2.320.000 dans le secteur public (préparatoire, écoles, collèges, technique, et lycées). Nous avons aussi plus de 300.000 étudiants dont 48.000 dans l’enseignement privé et 252.000 dans l’enseignement public. Notre estimation budgétaire reste approximative, mais a le mérite de donner un ordre de grandeur du business de cette rentrée scolaire et universitaire.
Selon nos calculs, les ménages tunisiens vont débourser 1037 Millions de dinars durant cette rentrée scolaire et universitaire, et ceci ne prend pas en considération les autres frais liés aux vêtements, et couvrent seulement le premier mois de la rentrée (principalement pour la scolarité dans le secteur privé). Le coût moyen d’un élève ou d’un étudiant, toute catégorie confondue (public et privé) est de 360 Dinars, rien que pour la rentrée. Un chiffre très important, qui peut être affiné par des enquêtes de terrain.
La galère des tunisiens pour faire étudier leurs enfants ne s’arrête pas à ces dépenses, mais continue durant toute l’année et ainsi inclure les frais des cours particuliers qui prennent de plus en plus d’ampleur durant les dernières années, de l’argent de poche, du panier du goûter pour certains enfants,….
Le gouvernement doit travailler sur un projet de fond de soutien pour les familles nécessiteuses et ayant plusieurs enfants à charge à l’instar de ce qui se passe en France, et ne pas se limiter aux aides maigres pour certaines familles. En effet, les ménages français bénéficient d’une allocation de rentrée scolaire (ARS) et qui concerne les familles ayant à charge des enfants âgés de 6 à 18 ans scolarisés dans un établissement public, privé, ou même en apprentissage si leur rémunération ne dépasse pas 55 % du Smic. Son montant varie en fonction de l’âge de l’enfant : 423,48 € (6 à 10 ans), 446,85 € (11 à 14 ans) ou 462,33 € (15 à 18 ans). Il existe aussi des bourses réservées aux familles modestes ayant des enfants scolarisés au collège ou au lycée. Pour y être éligible, il faut là aussi être sous un certain plafond de ressources relatif à son nombre d’enfants. Ces idées peuvent confirmer le rôle social de l’Etat tel que voulu par le président de la République.
