La consommation (publique et privée) demeure le plus important moteur pour la croissance en Tunisie. Une croissance qui montre depuis quelque temps des signes de reprise.
L’importance de cette consommation est démontrée par les chiffres. En effet, la demande intérieure a augmenté de 8,2 % à prix courants et de 2,1 % à prix constants en 2024. C’est ainsi que la consommation finale a contribué positivement à la croissance globale de 1,6 point de pourcentage contre 1.4% en 2023.
Selon les statistiques de la BCT, la consommation privée ainsi que la consommation publique ont tous les deux doublé durant les 10 dernières années. La consommation privée est passée de 63.5 milliards de dinars en 2015 (au prix courant), à 128.4 milliards de dinars en 2024. Quant à la consommation publique elle est passée de 16 milliards de dinars à 32.5 milliards de dinars en 2024.
Au détail, et pour 2024, la consommation privée qui représente 77% du PIB a progressé de 1,7%, aux prix constants (contre 1,5% en 2023), et de 9% aux prix courants (contre +10,9% en 2023). Quant à la consommation publique, elle est restée stable (+7,3% en valeur nominale et +1,2% en termes réels contre respectivement +7% et +1,1% en 2023).
Cette situation ne doit pas nous cacher une réalité plus amère. En effet, l’analyse de la demande intérieure en général et la consommation finale en particulier (publique et privée) montre une faiblesse au niveau de l’investissement public et une stagnation, sinon un recul au niveau des ménages.
Les récents chiffres de la Banque Mondiale sur la croissance dans le monde alertent sur une tendance grave pour la Tunisie durant les prochaines années. En effet, selon l’institution la consommation publique va enregistrer une croissance de 2.5% en 2025, mais va baisser de -0.6% en 2026 et – 1.2% en 2027. Ceci témoigne que les investissements publics et l’intervention des finances de l’Etat vont atteindre leurs limites. Quant à la consommation privée elle va enregistrer une croissance de 4% en 2025, mais va baisser au niveau de 3.6% en 2026 et 3.3% en 2027. Des chiffres qui ne font que tirer la sonnette d’alarme.
Si les prévisions de la Banque Mondiale se confirment, il risque d’y avoir des dégâts économiques importants.
Une décélération du rythme de la consommation privée peut entrainer une baisse de la demande pour les entreprises qui vont logiquement réduire leur production, annuler ou retarder des investissements d’extension ou de rénovation, et ceci mène directement à un ralentissement du PIB. Une baisse de la demande des ménages engendrera aussi une montée du chômage.
Si la baisse est causée par une hausse de l’inflation mesurée ou ressentie, la baisse de la demande n’engendre pas automatiquement une baisse des prix, au contraire elle va causer une stagflation, c’est-à-dire que les prix vont demeurer élevés.
De l’autre côté, la baisse de la consommation publique signifie une baisse de la demande globale et engendrera ainsi un effet récessif.
Une baisse des dépenses publiques se traduit généralement par des gels au niveau des recrutements et une détérioration de la qualité des services publics. Le financement des produits subventionnés peut aussi baisser et ainsi créer des perturbations de l’approvisionnement des produits de première nécessité. Résultat des courses : un freinage de la croissance.
En conclusion, la combinaison d’une baisse de la consommation publique et la consommation privée mène directement à la récession.
Les prémisses du prochain budget confirment que l’Etat ne va pas réduire ses dépenses pour l’année prochaine. En effet, il est prévu des recrutements dans la fonction publique pour plus de 23.000 nouveaux fonctionnaires. L’Etat a aussi prévu l’augmentation des salaires dans la fonction publique. Pour les dépenses de la compensation, il n’y aura aucun changement. La Tunisie pourra bénéficier d’une légère accalmie des cours de certains produits importés.