Au cours de la dernière décennie, l’Union Sportive Monastirienne (USMo) a bouleversé la hiérarchie du football tunisien. Longtemps considérée comme un club de tradition mais sans palmarès majeur, l’USMo s’est progressivement imposée parmi les grands grâce à une gestion financière et sportive atypique. Là où beaucoup de clubs tunisiens vivent au rythme des crises, Monastir avance à pas sûrs.
Une ascension régulière
Depuis 2019, l’USMo s’installe régulièrement dans le Top 4 de la Ligue 1 professionnelle, décrochant même son premier trophée en Coupe de Tunisie 2020 face à l’Espérance Sportive de Tunis. Ce sacre, véritable tournant, a ouvert la voie à une participation régulière aux compétitions africaines, dont une demi-finale de la Coupe de la CAF en 2023.
Cette réussite n’est pas le fruit du hasard : elle s’inscrit dans une stratégie construite, faite de discipline et d’anticipation.
Des ressources financières maîtrisées
Sur le plan financier, l’USMo bénéficie du soutien de sponsors de taille :
• BIAT (secteur bancaire),
• SAÏD (industrie agroalimentaire),
• GAT Assurances (assureur national majeur).
Ces partenariats garantissent des revenus stables, mais la clé réside ailleurs : contrairement à des clubs comme le Club Africain ou le CS Sfaxien, dont les finances sont régulièrement plombées par des dettes et litiges internationaux, l’USMo a choisi une gestion sobre.
La famille Mabrouk, influente dans la gouvernance du club, a imposé une ligne claire :
• pas de recrutements pharaoniques destinés à séduire les supporters à court terme ;
• priorité aux jeunes talents et aux joueurs à fort potentiel de revente ;
• équilibre budgétaire constant, sans accumulation d’arriérés salariaux.
Des choix sportifs stratégiques
• Recrutements ciblés : plutôt que de dépenser plusieurs millions de dinars sur une seule star, le club mise sur des joueurs en devenir. Exemple : l’attaquant Elias Achouri, recruté à moindre coût, qui a ensuite rejoint le FC Copenhague après avoir brillé sous les couleurs monastiriennes.
• Cessions rentables : le club génère des revenus conséquents en transférant ses pépites à l’étranger ou vers les géants locaux, sécurisant ainsi des rentrées régulières.
• Staff local : les entraîneurs et préparateurs sont souvent issus de la région ou formés au club, limitant les dépenses colossales liées aux techniciens étrangers et renforçant l’ancrage identitaire.
Comparaison avec d’autres clubs tunisiens
• Espérance de Tunis (EST) : modèle sportif basé sur une puissance financière écrasante, mais nécessitant un budget annuel dépassant les 50 millions de dinars.
• Club Africain (CA) : riche en histoire, mais constamment étranglé par des dettes (plus de 20 millions de dinars cumulés en litiges FIFA).
• Étoile du Sahel (ESS) : vit une instabilité chronique, alternant coups d’éclat et crises financières.
Face à ce paysage, l’USMo se distingue par sa stabilité : avec un budget annuel estimé entre 12 et 15 millions de dinars, le club a réussi à bâtir un modèle compétitif et équilibré.
Un modèle inspirant pour le football tunisien
L’expérience monastirienne démontre qu’il est possible de concilier :
• stabilité financière,
• ambitions sportives,
• et ancrage régional fort.
Alors que la plupart des clubs tunisiens réclament l’aide de l’État ou s’enfoncent dans les dettes, l’USMo trace sa voie avec discipline et démontre que la rigueur peut constituer une stratégie gagnante.
L’Union Sportive Monastirienne est aujourd’hui bien plus qu’un simple club régional : c’est un laboratoire de gouvernance sportive. En dix ans, elle a réussi à s’imposer parmi l’élite, non pas grâce à des dépenses extravagantes, mais grâce à une stratégie patiente et durable.
Le football tunisien, souvent secoué par les dérives financières, gagnerait sans doute à s’inspirer de ce modèle…





















