Tunis, 24 novembre 2025 – Alors que la Tunisie fait face à un stress hydrique croissant, des experts, chercheurs et acteurs économiques se sont réunis à la Maison de l’Entreprise, à l’initiative de l’IACE et du Centre des Changements Climatiques, pour proposer des solutions concrètes et innovantes. Le constat est unanime : l’eau ne doit plus être considérée comme une charge, mais comme un capital stratégique à préserver et à valoriser.
Changer de paradigme : de la charge au capital
« L’eau n’est pas une charge, c’est un actif de production stratégique », affirme Mme Amel JRAD, lors de son intervention. Dans un contexte de raréfaction et de changements climatiques, continuer à gérer l’eau comme une simple dépense revient à hypothéquer l’avenir. Elle souligne que l’eau est un capital naturel et financier qui soutient l’agriculture, l’industrie, le tourisme et la santé publique. La valoriser, c’est sécuriser l’économie nationale.
La réutilisation des eaux usées traitées : un potentiel sous-exploité
Dr. Olfa Mahjoub, de l’INRGREF, a présenté un état des lieux contrasté de la réutilisation des eaux usées traitées (REUT). Si la Tunisie dispose d’un cadre réglementaire avancé et d’une expérience de plusieurs décennies, seulement 4% des eaux usées traitées sont directement réutilisées en agriculture. Pourtant, avec 295 millions de m³ traités en 2024, le potentiel est immense. La Stratégie REUSE 2050 vise à porter ce taux à 80% d’ici 2050, avec un objectif de 56 000 hectares irrigués.
Le dessalement : une solution incontournable mais exigeante
Le Pr. Béchir Hamrouni, président de l’Association Tunisienne de Dessalement, a rappelé que le dessalement est devenu une solution incontournable pour diversifier les ressources en eau. Cependant, il alerte sur les défis : consommation énergétique élevée, impacts environnementaux liés à la saumure, et coûts importants. Il plaide pour l’intégration des énergies renouvelables et la récupération des ressources contenues dans la saumure.
L’agriculture de précision : optimiser chaque goutte d’eau
Du côté des solutions digitales, Houssem Aouadi de Seabex a présenté une plateforme d’agriculture de précision pilotée par l’IA, permettant des économies d’eau allant jusqu’à 40%. Sans capteurs physiques, le système crée un « jumeau numérique » de la parcelle pour optimiser l’irrigation. Il soulève aussi un défi de taille : lorsque l’eau est perçue comme gratuite – avec le photovoltaïque –, le gaspillage devient automatique. La solution doit donc être autant technique que comportementale.
Une feuille de route commune pour 2050
Les intervenants s’accordent sur la nécessité d’une vision intégrée et collaborative. Le « Plan Eau 2050 » du gouvernement, évalué à 23 milliards d’euros, doit être accéléré. Modernisation des réseaux, tarification incitative, innovation financière et renforcement de la gouvernance sont autant de leviers à actionner.
l’eau, affaire de tous
« Ce n’est pas l’eau qui coûte cher ; c’est de ne pas en avoir qui l’est », rappelle une intervenante. Alors que la Tunisie avance vers un avenir plus sec, la résilience hydrique passera par la mobilisation de tous les acteurs – publics, privés, agriculteurs et citoyens – autour d’une gestion durable et anticipative de cette ressource vitale.





















