La Tunisie a traversé une période économique tumultueuse entre 2021 et 2024, marquée par des crises successives et des défis structurels persistants. Un récent rapport de l’IACE (Institut Arabe des Chefs d’Entreprises) révèle les tensions entre la nécessité de préserver le rôle social de l’État et les impératifs de discipline budgétaire, dans un contexte où la dette publique dépasse 80 % du PIB depuis 2022.
Un déficit budgétaire en hausse malgré les ajustements
Le déficit budgétaire a oscillé entre 6 % et 8 % du PIB durant cette période, dépassant systématiquement les prévisions initiales. En 2024, le gouvernement a évité une loi de finances rectificative pour la première fois depuis des années, signe d’une légère amélioration dans la maîtrise des dépenses. Cependant, l’écart entre les projections et les réalisations souligne la fragilité des prévisions, notamment en raison de la volatilité des prix du pétrole (Brent) et des taux de change.
Recettes fiscales : Une performance en dents de scie
Les recettes fiscales, pilier des ressources budgétaires (90 % du total), ont souffert du ralentissement économique. Le taux d’exécution des impôts sur les sociétés non pétrolières a plongé à 56,9 % en 2023, reflétant les difficultés des entreprises. La pression fiscale, bien qu’élevée (25,4 % du PIB en 2024), n’a pas suffi à compenser la baisse de l’activité, accentuant le poids des prélèvements sur un PIB en contraction.
Dépenses publiques : Le poids des rigidités
Les dépenses sociales et le service de la dette ont absorbé 88,9 % du budget en 2024, limitant la marge de manœuvre pour l’investissement public (seulement 7 % des dépenses). Les subventions énergétiques, multipliées par plus de deux depuis 2021 (7 000 MDT en 2024), pèsent lourdement sur les finances publiques. Malgré une hausse des dépenses d’investissement (+14,4 % en 2024), leur part reste faible, signe d’une incapacité à relancer la croissance par les infrastructures.
Endettement : Une bombe à retardement ?
La dette publique, stable à 81,2 % du PIB en 2024, masque des risques accrus :
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Le recours massif à l’emprunt intérieur (121,3 % des prévisions en 2024), souvent coûteux, a compensé la faible mobilisation des financements extérieurs (61,7 %).
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Le service de la dette atteint 52,5 % des ressources propres en 2024, dépassant le seuil critique de 40 %.
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Les entreprises publiques, comme la BNA, s’endettent pour pallier les déficits (960 MDT pour les céréales en 2024), alourdissant les garanties de l’État.
Premiers signes d’amélioration en 2025 ?
Les données du premier trimestre 2025 montrent un excédent budgétaire (2 078 MDT), porté par une hausse des recettes fiscales (+7,7 %). Cependant, cet optimisme est tempéré par :
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Une baisse des dépenses d’investissement (-33,7 %), révélatrice de tensions de trésorerie.
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Un recours exceptionnel à la Banque centrale (7 000 MDT), preuve des difficultés persistantes à boucler les financements.