جريدة الخبير

La Russie sacrifiera-t-elle les BRICS et le Moyen-Orient pour un rapprochement avec Trump ?

Les récents échanges entre Vladimir Poutine et Donald Trump, bien que non officiels, suscitent des interrogations quant à l’avenir de la politique étrangère russe, notamment en ce qui concerne son engagement au sein des BRICS et ses alliances stratégiques au Moyen-Orient. Alors que Moscou a multiplié ces dernières années les initiatives pour renforcer son influence dans ces deux sphères, un éventuel rapprochement avec Washington pourrait-il remettre en cause ces alliances ?
Un contexte de recomposition géopolitique
Depuis son exclusion du G8 en 2014 à la suite de l’annexion de la Crimée, la Russie a cherché à diversifier ses partenariats économiques et diplomatiques pour contourner les sanctions occidentales. L’un des axes majeurs de cette stratégie a été le renforcement des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), un bloc économique visant à contrebalancer l’hégémonie occidentale.
En parallèle, Moscou s’est imposé comme un acteur clé au Moyen-Orient, en s’alliant avec l’Iran, la Syrie et d’autres États de la région. La guerre en Syrie a permis à la Russie de démontrer sa puissance militaire et diplomatique, tandis que sa coopération avec l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis dans le cadre de l’OPEP+ lui a assuré une influence décisive sur le marché énergétique mondial.
Trump et Poutine : vers un nouveau pacte ?
Si Donald Trump revient au pouvoir en 2025, il pourrait adopter une politique plus conciliante envers la Russie, à l’opposé de l’administration Biden qui a renforcé les sanctions contre Moscou. Trump a déjà laissé entendre qu’il pourrait négocier avec Poutine pour trouver un accord sur l’Ukraine, ce qui pourrait ouvrir la voie à un dégel partiel des relations entre Washington et Moscou.
Dans cette perspective, un apaisement des tensions avec les États-Unis pourrait-il pousser la Russie à se détourner des BRICS et de ses partenaires au Moyen-Orient ? Plusieurs facteurs rendent ce scénario peu probable. D’une part, la Russie a investi d’importantes ressources pour consolider son influence dans ces régions et il serait stratégique de ne pas s’en retirer précipitamment. D’autre part, même en cas de rapprochement avec Trump, la méfiance entre Moscou et Washington restera forte, notamment en raison de l’opposition structurelle des intérêts des deux puissances.
Les BRICS : un outil stratégique pour Moscou
Le groupe des BRICS est devenu un pilier central de la politique économique russe. Il permet à Moscou de réduire sa dépendance au dollar, d’accéder à de nouveaux marchés et d’afficher une alternative au modèle occidental. La Russie a joué un rôle clé dans l’expansion des BRICS avec l’intégration récente de nouveaux membres, dont l’Iran, un partenaire stratégique de Moscou au Moyen-Orient.
Abandonner cette alliance affaiblirait la position de la Russie face aux sanctions occidentales et réduirait son influence sur l’architecture financière émergente qui cherche à concurrencer le FMI et la Banque mondiale.
Le Moyen-Orient : une carte maîtresse pour le Kremlin
Sur le plan géopolitique, Moscou ne peut pas se permettre d’abandonner ses alliances au Moyen-Orient. L’Iran, la Syrie et les groupes pro-russes en Libye et au Yémen sont des leviers d’influence majeurs contre les États-Unis et leurs alliés. De plus, la coopération avec les monarchies du Golfe dans le cadre de l’OPEP+ reste essentielle pour stabiliser les prix du pétrole et préserver les revenus de l’État russe.
Même en cas de détente avec Washington, la Russie continuera donc à jouer un rôle de médiateur et de puissance influente au Moyen-Orient.
Conclusion : un réalignement, mais pas un abandon
Si un rapprochement entre Trump et Poutine peut modifier certains équilibres, il est peu probable que la Russie renonce aux BRICS ou à ses alliances au Moyen-Orient. Ces partenariats sont devenus des piliers de sa stratégie internationale et lui offrent des marges de manœuvre face aux pressions occidentales.
Un scénario plus probable serait une tentative de Moscou de tirer profit d’un éventuel retour de Trump pour obtenir un allègement des sanctions, tout en continuant à renforcer ses liens avec ses alliés traditionnels. La Russie cherchera donc à jouer sur plusieurs tableaux, sans pour autant se désengager de ses engagements stratégiques.
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